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MADRID

OMNISCIENT

2 AOUT 2016


Antoine préparait les affaires de son fils pour quitter la maison. Il avait prévu d'aller dans un parc où il rejoindrait Carolina. Ils s'étaient énormément rapprochés depuis l'incident des convulsions de Nolan à l'hôpital. L'Espagnole était restée un long moment avec le châtain à l'hôpital avant de devoir le quitter pour rentrer chez elle puisqu'elle travaillait le lendemain. Elle avait pris des nouvelles du petit bonhomme qui allait beaucoup mieux désormais.

     Le Français mit Nolan dans sa poussette avant de fermer derrière lui la maison. Le parc était à environ huit cent mètres à pied alors un peu de marche ne lui ferait pas de mal. D'autant plus qu'il avait intérêt à être en forme puisqu'il reprenait les entraînements avec son club le lendemain.

     Carolina venait d'arriver au parc, son téléphone à l'oreille. Nikolas avait fait brûler le repas qu'il comptait manger ce midi et il n'arrivait pas à décrasser la poêle. Les parents n'étant pas à la maison, mais au travail, il ne savait pas à qui demander alors il avait appelé sa demi-sœur en panique.





Normalement, ma mère a du bicarbonate. Tu le trouves, tu saupoudres la poêle de bicarbonate et tu rajoutes environ deux centimètres d'eau. Tu fais chauffer jusqu'à ébullition et tu laisses reposer quinze minutes. Normalement, après c'est bon. T'as plus qu'à nettoyer la poêle avec du liquide vaisselle et à rincer.

Je vais essayer ça alors, mais si ça marche pas, je fais comment ?

Ça va marcher Nikolas, je l'ai déjà fait.

Si tu le dis.





Ils raccrochèrent et la brune entendit un raclement de gorge derrière elle. Elle se retourna et découvrit Antoine avec son fils dans sa poussette. Elle se leva du banc sur lequel elle s'était installée et enlaça le tatoué. Celui-ci lui rendit son étreinte alors qu'elle s'abaissait à la hauteur du petit. La ressemblance avec son père la frappa de suite.





Il a tes yeux. Exactement les mêmes.

Et le talent pour le ballon rond.

Et aller, un nouveau footeux dans la famille. Pauvres parents quand même, je les plains.





Le châtain donna un coup-de-poing dans l'épaule de Carolina qui fit mine d'être surprise par ce geste. Les deux adultes entrèrent dans le parc, marchant l'un à côté de l'autre. Ils avaient pris l'habitude de se raconter leur journée comme l'auraient fait de vieux amis qui se retrouvaient après un long moment. Il n'y avait aucun chichi, aucune prise de tête. Ils passaient simplement un bon moment sans en faire trop et c'est ce qui leur plaisait à tous les deux.





La maison est d'un coup beaucoup moins bruyante, ça fait du bien.

Je suis certaine que ton frère serait ravi de l'apprendre.

Faut avoir les nerfs solides pour vivre avec lui.

Je parie que t'es une tête à claques toi aussi, rit-elle.

Moi ? Mais pas du tout ! J'étais le gosse le plus adorable au monde.

Tu penses vraiment que je vais te croire ? Être l'enfant modèle n'est pas du tout de ton genre.

Et c'est quoi mon genre alors ? Il avait tourné la tête vers la brune. Dis-moi tout, je t'écoute.

Tout le contraire de l'enfant modèle. Je suis sûre que, même encore aujourd'hui, tu ne perds pas une occasion pour faire une connerie. Il y a un petit démon derrière ce visage d'ange.

J'ai un visage d'ange ?

C'est bien, tu n'es pas encore sourd.





Antoine jeta un regard à la jeune femme, un sourire en coin. Il l'appréciait de plus en plus au fil des jours, de leurs conversations. C'était une femme simple avec la joie de vivre et une envie de croquer la vie à pleine dent. Il l'avait toujours vu avec un sourire sur le visage. Pas un seul jour, ou peut-être seulement à l'hôpital, son visage avait montré une autre émotion.

    Ils s'installèrent finalement dans un coin tranquille, sur une couverture que le tatoué avait pris soin de prendre. Carolina, quant à elle, avait emmené le déjeuner. Un simple pique-nique, c'était soft et ça leur plaisait bien.

    Le numéro sept avec installé Nolan sur la couverture et lui avait donné son repas, écrasant ses légumes pour qu'il arrive à manger. Il continuait de faire attention à son fils même lorsqu'il mangeait lui-même. C'était un vrai papa poule. La jeune Perez trouvait le footballeur aux petits soins pour son fils et ça montrait bien qu'il n'était pas un mauvais père, au contraire.

    Ils avaient terminé de déjeuner lorsqu'ils furent coupés par un enfant âgé de la dizaine d'années. Ayant reconnu l'attaquant du club de la capitale, il lui demanda s'il pouvait prendre une photo avec lui, demande à laquelle l'attaquant du club de la capitale accepta.





Vous pouvez prendre la photo, s'il vous plaît ? Demande l'enfant à Carolina.

Oui, bien sûr !





La jeune femme prit le téléphone que lui tendait l'enfant et prit les deux garçons en photo. Antoine discuta quelques instants avec le fan du football avant que ce dernier s'éclipse, remerciant le joueur.





T'es adorable avec ces gamins.

Je suis désolé, ça...

Ne sois pas désolé, il y a pas de soucis, vraiment, affirma-t-elle. En fait, je trouve ça plutôt chouette que tu aies une relation comme ça avec les gens qui te suivent.

Je pense que c'est la moindre des choses. C'est vrai, ils sont toujours derrière l'équipe à nous supporter, à faire le déplacement pour les matchs, alors je pense que leur consacrer un peu de mon temps est normal. C'est ma façon de les remercier.





La brunette hocha la tête comme pour montrer au châtain qu'elle avait compris ce qu'il voulait dire.











MADRID

CAROLINE PEREZ

13 AOUT 2016





Je termine de m'occuper de la jambe de Katia. Ça fait des semaines qu'elle vient pour des séances et les progrès ne sont toujours pas visibles ce qui l'agace. Je peux la comprendre, parce que ne pas pouvoir marcher correctement ou même courir alors qu'elle fait du basketball est compliqué. Mais elle arrivera à s'y remettre, j'en suis certaine !





Aller, je frappe sa cuisse pour la réveiller un peu, rhabille-toi c'est fini pour aujourd'hui.

Alléluia ! Tu étais en train de me tuer la jambe là.

Il faut que tu souffres pour être rétablie.





Je quitte la pièce pour la laisser remettre son jean et vais me laver les mains. Je récupère mes affaires puisque ma journée est terminée. Je termine toujours plus tôt le samedi, à seize heures. Katia, sac dans la main, s'appuie contre le muret séparant la salle d'attente et le bureau. Mes affaires avec moi, je sors avec ma patiente du cabinet.





On se voit mercredi.

Je suis vraiment obligée de venir ? Non parce que je te connais, le samedi ça va à peu près, mais alors le mercredi j'en bave comme pas possible.





Je fais seulement mon travail. Et oui, je sais que ça peut être douloureux parce que certains exercices sont compliqués et font plus mal que d'autres en fonction de l'endroit touché, mais c'est en souffrant qu'on s'en sort. Ne dit-on pas qu'il faut souffrir pour être belle ? Je fais un simple signe de la main à Katia et monte dans ma voiture, jetant mon sac sur le siège passager. Je dois rejoindre mon frère dans un petit café.

     Je roule pendant à peine dix minutes avant d'arriver près du café où nous avons l'habitude de venir. Je me gare, coupe le moteur et prends mes affaires avec moi. J'entre dans le café et cherche des yeux Lukas. Il est installé à la table où nous nous installons dès qu'elle est libre. Fichue habitude pas vrai ? Je le rejoins et pose ma main sur son épaule. Il est avec Adam qui est assis sur ses cuisses. J'embrasse la joue de mon frère qui me tend mon neveu puisque celui-ci me tend ses petits bras.





Tu m'as manqué beau gosse.

Hum, merci, c'est gentil.

Je parle à mon neveu, merci bien le frangin.

C'est mon fils, il a mon sang, mes gênes alors je suis aussi beau gosse.

J'irais pas jusque-là...

Saleté.

Il y a beaucoup d'amour par ici dit donc.





Je rêve. Ce n'est pas possible. Non. Je me retourne pour voir la personne qui vient de parler. C'est une blague ? Ouais, ça doit être ça. Je fais des allers-retours entre mon frère et cette fille qui n'est autre que notre sœur. Sœur que je n'ai pas vu depuis des années, trois pour être précise.





Tu m'expliques ?

Ça ne peut pas continuer, Carolina. Vous êtes sœurs, vous avez le même sang qui coule dans vos veines et vous ne pouvez pas continuer à vous ignorer, faire comme si l'autre n'existait pas. Ce n'est plus possible.

Ah si, c'est possible. La preuve, je me tire !





Je me lève de ma chaise en prenant soin de ne pas faire mal à Adam et le rend à son père. Je quitte en furie le café. J'ai vraiment l'impression que je suis en plein cauchemar. Comment peut-elle se repointer comme ça ? On n'est pas dans le monde des Bisounours. Comme madame veut réapparaître dans ma vie, elle revient comme une rose. Je rêve. Il n'y a pas marqué débile sur mon front non plus.





Carolina !





C'est qu'en plus, elle me suit ! Elle ne lâche pas contrairement à avant. « Caro ! » C'est la goutte qui fait déborder le vase. Elle n'a pas le droit. Elle ne peut pas faire ça. Je fais volte face et la découvre juste devant moi.





Plus jamais, tu ne m'appelles comme ça ! Je pointe son visage de mon index. Tu as perdu le droit de m'appeler Caro quand tu t'es cassée alors que j'avais le plus besoin de toi. Plus de Caro pour toi, fini !

Ne te mets pas en colère contre Lukas, c'était mon idée.

De mieux en mieux !

Tu es ma sœur, Carolina et...

Et rien du tout, la coupai-je. Est-ce que tu es vraiment ma sœur ? Je ne pense pas. Tu fais plutôt partie des personnes qui ont été éduquées avec moi, mais tu n'es pas ma sœur. Si tu l'étais vraiment, tu ne m'aurais pas laissé. Tu ne serais pas partie alors que j'étais en train de me noyer dans toutes ces merdes à cause de mon genou. Tu seras restée si c'était le cas et tu m'aurais aidé. Tu n'as rien fait de tout ça. Rien, nada.

Et j'en suis désolée ! S'écrit-elle. Je le regrette amèrement et crois-moi quand je te dis ça.

J'ai arrêté de te croire quand tu t'es rangé du côté à notre cher père.





Je me retourne et la laisse sur ce trottoir près du café. Qui aurait cru qu'elle allait réapparaître dans ma vie ? Pas moi en tout cas. J'ai osé espérer qu'elle revienne dans ma vie pendant des mois, mais elle n'est jamais revenue, alors j'ai arrêté d'y croire. Je me suis faite à l'idée qu'elle m'avait lâchée. Ma sœur avec qui j'avais une relation fusionnelle m'avait laissé tomber alors que je venais de me tuer le genou, que j'avais appris que je ne pourrais plus refaire de handball. Et le pire dans tout ça, c'est qu'elle n'était pas là pour me sortir la tête de l'eau lorsque j'étais en train de sombrer dans toutes ces merdes illicites.

Elle n'était pas là pour me faire la morale, pour me secouer et me dire mes quatre vérités en face. Elle n'était pas là pour le faire et Lukas a dû la remplacer. Il a été le premier de ma famille à comprendre que quelque chose n'allait pas chez moi, que j'avais changé et que j'étais en train de mourir à petit feu. Il m'a plongé la tête dans une bassine froide avec Elena, c'est clairement ce que j'ai ressenti. Ils m'ont tous les deux remis les idées en place. Je me tuais moi-même et je le savais, mais quand vous perdez la seule raison pour laquelle vous vous levez le matin, votre vie n'a plus de sens, vous vous sentez déjà mort. La seule chose que vous pouvez faire, c'est contribuer à votre fin et regarder les dégâts. Regarder votre vie éclater en mille morceaux.

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